Jeudi 13 juillet 2017, une présumée affaire de viol suivie de meurtre a secoué le climat pacifique à Ouest Foire. Il s’agit d’une femme, Aminata Ndiaye, dont le corps sans vie a été sorti de la maison d’un courtier cueilli et plongé dans les geôles de Rebeuss. L’horreur a servi de prétexte pour faire immersion dans le monde du courtage à femmes de ménage. Petite enquête…
Dans ce contexte, le courtier est un métier qui consiste à aider le particulier ou l’entreprise qui le mandate à trouver une personne (femme de ménage, gardien, ou un garçon de service) qui correspond à son besoin. C’est, en quelque sorte un intermédiaire qui facilite une relation sous forme de contrat entre employé et employeur. Un nouveau métier qui nourrit son homme, certes. Mais qui peut hanter la vie de son homme, aussi.
C’est le cas de Ngagne Dia, impliqué dans une affaire de meurtre qui a emporté Aminata Ndiaye, mariée et mère de famille. Dans ce domaine, la vie de l’exerçant est fragilisée par la présence de différentes sortes de femmes qui composent son entourage. La tentation, le vol, le viol, le sexe, la bagarre, ou encore la menace, constituent le gratin d’une collaboration pourtant fructueuse pour les deux parties.
Assane Tine, habitant de Réfane, un sérère mystique et mythique qui, dans le pétrin, n’hésitant pas à user des incantations pour échapper à certaines menaces, s’en est convaincu. En effet, ce dernier tente de redéfinir son travail d’agent de femmes de services : “Il s’agit de permettre à une fille de trouver un travail de domestique, ou de permettre à une maîtresse de maison de trouver une «serveuse, ou une femme de ménage simplement” déclare Assane Tine.
Cet homme a, sous sa tutelle, des femmes, des jeunes filles. Chaque matin, elles le retrouvent sous la passerelle du Cices, “Centre international du commerce extérieur du Sénégal (Cices) situé sur la VDN. Ici, ces femmes, en quête de travail, passent toute la journée à guetter un employeur. Assane, le facilitateur, se lève de sa chaise, muni de son téléphone portable, fier de sa profession se dit prêt à répondre aux interrogations des serviteurs.
« Ici, quand quelqu’un sollicite nos services, j’interpelle la fille et lui explique les conditions de l’employeur. Après lui avoir trouvé un employeur, la fille se charge de négocier personnellement son salaire. Notre condition est qu’après consensus, l’employeur doit verser 5000 F. La serveuse engagée doit aussi donner 3000 F. Mais généralement, elle ne peut avoir la somme demandée qu’à la fin de son premier moi. Et elle ne donne cette somme qu’une seule fois. Voilà ce qu’on en gagne en tant que courtier ou agent » explique le courtier.
« Qui ne risque rien n’a rien », dit l’adage. Et ces agents ou courtiers gagnent leur pain sous la hantise d’énormes risques qui les jettent parfois dans la gueule du loup. Des menaces, des insultes, remboursement d’un montant volé ou d’un objet même gâté, meurtre, garnissent souvent leur escarcelle.
Le cas Ngagne, (à voir dans kéwoulo.info), est patent. Sorti en sueurs d’un bâtiment inachevé qui lui sert de maison, Ngagne Dia s’est mis à appeler au secours. « Aidez-moi, aidez-moi, une femme est tombée dans ma maison », criait-il. Selon les témoins interrogés par le journaliste Babacar Touré, la victime était allongée par terre« couchée sur le dos, du sang coulait des narines”. A les en croire, la dame ne respirait pas et ne portait, par contre, aucun hématome sur le corps. Selon eux, rien ne prouvait qu’elle a était battue, par contre le drame va précipiter la détention Ngagne Dia.
Ainsi, Assane Tine a la tête farcie d’anecdotes du genre : narre:« Je fais ce métier depuis 2006. Et je me suis installé ici, (sous la passerelle du Cices, depuis 2012. Nous avons souvent ces genres de problèmes. Il est arrivé plusieurs fois qu’on me demande de payer une somme d’argent qui serait volée par une fille que j’ai mise en rapport avec un employeur. Parfois on propose une fille à quelqu’un et qu’on vienne le lendemain me dire qu’elle a fui parce qu’elle a volé un bien. C’est pourquoi on demande des photocopies de sa pièce d’identité. On garde l’une et donne l’autre à l’employeur. Quand il y a problème on peut être sûr que la fille est sous notre tutelle. »
Sur les lieux, certaines jeunes filles défient parfois l’autorité de Assane, qui selon elles ne saurait les chasser. Sur ce, il fustige:« Il y a des filles très indisciplinées. Elles viennent me solliciter et restent avec moi, ici. Elles se bagarrent parfois. Je n’y peux rien. Si je les exhorte de quitter les lieux, elles me rétorquent : vous n’êtes pas propriétaire des lieux, ni le chef. Alors vous ne pouvez pas nous obliger de quitter.»
Parmi les protégées de Assane, une liane au caractère d’un garçon manqué qui parfois même fait les travaux d’homme pour subvenir à ses besoins. « J’ai été maçon plusieurs fois. On me payait bien. Je suis preneur de tout ce que je peux faire pour gagner dignement ma vie », clame t-elle. Une autre répondant au nom de Fatou Binetou Ka dont les cheveux sont de couleur noire fadasse, cheveux défrisés, mettant en exergue ses yeux creux, visage crispé conforte son patron : « parfois il y a des filles qui sont mal éduquées. Elles peuvent créer des problèmes au courtier. Par exemple quand quelqu’un vole de l’argent dans son lieu de travail et fuit, le courtier risque de payer les peaux cassées. D’ailleurs, Il arrive qu’un courtier soit menacé d’une plainte. C’est un travail quand même risqué et difficile. »
Et quand l’amour s’y mêle, ça devient extraordinaire. « Tout, y est », termine Assane.
A suivre…
