Grandeur et décadence? C’est bien connu, après avoir atteint l’apogée, on ne peut plus que redescendre. Il en est des empires comme des individus. Cette vérité éternelle serait-elle en train de s’appliquer à Cheikh Amar, milliardaire flamboyant des années Wade, sublimé par les chanteurs, courtisé par les marabouts, couru par les politiciens et les organisateurs de spectacles, adulé par la presse?
L’histoire commence à la fin de l’année dernière lorsque notre milliardaire flashe littéralement sur le superbe immeuble de cette émigrée aux États-Unis, sis dans le quartier huppé des Almadies. Un immeuble loué auparavant par des Américains qui, eux, ont toujours payé rubis sur l’ongle. Hélas, ils ont été obligés de déménager du fait des nuisances sonores provoquées par les appels à la prière de l’imam d’une mosquée située non loin.
Après avoir bien négocié, Cheikh Amar prend l’immeuble en location à un prix (8.800.000 francs/trimestre) un peu inférieur à celui que payaient les Américains. Pour la propriétaire, c’était assurément une bonne affaire qui lui permettait de continuer à payer la BHS (Banque de l’Habitat du Sénégal) qui lui a prêté la somme nécessaire à l’achat de l’immeuble.
Hélas, après avoir acquitté correctement le loyer -payable par trimestre-, la première échéance, notre milliardaire se met à traîner les pieds. Ou, du moins, à tarder à honorer ses engagements. Par la suite, il a fallu à chaque fois une lettre de relance de l’avocat de la bailleresse pour qu’il accepte de libérer un chèque. Mais pour le loyer du quatrième trimestre -le bail à usage professionnel est conclu pour une durée d’un an-, le patron de Tracto Service Équipement (TSO) refuse tout simplement de passer à la caisse.
La dame a eu beau lui servir des commandements d’huissier, il fait le mort. C’est donc en désespoir de cause que Mme F. S., qui lui a déjà fait savoir par voie d’huissier qu’elle ne renouvellerait pas son bail, a décidé de traîner Cheikh Amar devant le Tribunal de Grande Instance de Dakar pour demander son expulsion.
Comme un vulgaire locataire de Grand-Dakar ou de Guédiawaye qui ne pourrait pas payer son loyer? L’affaire sera appelée pour la première fois lundi prochain. Grandeur et décadence, splendeur et misère d’un homme qui fut riche comme Crésus et dont on espère qu’il n’est pas devenu pauvre comme Job.
Christian Sène
(Le Témoin)
