Démocratie au Sénégal : quels sont les véritables périls et qui en sont les principaux Acteurs ?
A l’évidence, les émotions et les partis pris mis à part , En Afrique le Sénégal reste à la tête du peloton en matière de Démocratie, de respect des Libertés qui ne sont pas seulement politiques, de Droits Humains qui ne sont pas exclusivement politiques non plus, nonobstant quelques rares cas d’école de procédures judiciaires controversées, inhérentes à la complexité du Droit et à toutes les justices, particulièrement dans les grandes Démocraties, en France et aux Etats Unis.
Dans ce cadre l’opposition et les détracteurs du Pays jouent sur deux muses dont le procès du Maire de Dakar qui au cours d’une procédure d’inculpation est devenu Député, inédit, et la CREI avec le renversement de la charge de la preuve de la Loi sur l’enrichissement illicite (CREI, exception sénégalaise dans un contexte inédit de fabrication de milliardaires partis de rien).
Pourtant sur les deux cas le Pouvoir en place, émanation de la volonté populaire d’alors, est resté cohérent avec celle-là et avec la commande sociale qui voulait la Rupture, la reddition des comptes et la traque de toute cette génération spontanée de milliardaires supposés de l’ancien régime, même si par endroits, des défaillances dont seule la géostratégie micro ou macro, pourrait justifier.
A ce titre l’ampleur du spectre in soupçonnée du Séisme national voire international que la Loi très pertinente contre l’enrichissement illicite avec cette disposition originale de renversement de la preuve mais aussi potentiellement très efficace contre la corruption, justifie à suffisance, la volte face, le repositionnement de beaucoup de compatriotes par rapport à cette loi, leur compassion et la prise de position non désintéressée en faveur de la première victime qui était pourtant pointée du doigt par tous comme devant être le premier cobaye eu égard à toutes les Responsabilités que le dauphin de son père a eu à assumer (Ciel, Terre , Energie, sous –sol, OCI etc…).
Ainsi au plan international la muse contre la CREI est vite dansée par les magnats du Capital et leurs suppôts de l’intérieur car avec le renversement de la charge de la preuve dans un monde de corruption, de blanchiment de capitaux et de fraudes fiscales, un instrument comme la CREI est suicidaire pour le Capital et ne doit pas prospérer, d’où tous les blocages contre l’exécution de ses décisions et l’acharnement des Droits de l’hommiste qui y trouvent le prétexte aux dénigrements et aux calomnies injustes .
Le Recul Démocratique, ne saurait non plus se mesurer à l’aune de manifestations interdites qui sont infimes par rapport à celles autorisées et surtout quand celles-là procèdent parfois de calculs politiciens ou revêtent un caractère de défiance à l’autorité. La formule « Autorisée ou pas… » est un défi à l’Autorité et à l’ordre public qui incommode plus d’un.
En vérité les périls de notre Démocratie relèvent plutôt de maladies infantiles handicapantes dont souffre chacun des trois acteurs majeurs de toute Démocratie si toutefois ne soigne pas sa mise en faisant preuve de Responsabilité et de maturité : les Acteurs politiques, la Société civile et la Presse nationale
Pour Les jeunes Démocraties , n’ayant pas encore terminé le cycle de maturation démocratique, le premier péril réside dans la posture et le comportement des organisations dites des Droits de l’homme, ou de la société civile, surtout au niveau des hommes qui les animent s’ils ne sont pas armés d’une certaine lucidité politique et sociale, d’un sens élevé de leur responsabilité civile et morale, du sacerdoce de servir toujours les masses et non les individus de manière désintéressée. Ce qui ne semble pas être la cas aujourd’hui.
Pire aux yeux de beaucoup d’observateurs, la plupart de ces organisations jouent au clair-obscur et constituent très souvent des rampes de lancement de leur leader vers des stations et rentes politiques. Ce faisant elles brouillent les lignes, installent le scepticisme et la méfiance entre acteurs.
Le deuxième péril pour notre démocratie est la composition hétéroclite, avec des niveaux politiques, culturels disparates et une mauvaise perception de la politique comme moyen d’ascension personnelle, toutes choses qui expliquent l’impossibilité d’élaborer des programmes ou de soutenir des débats politiques, économiques, relevés à la place des diatribes et des médisances personnelles ou des fantasmes.
IL ya en outre cette perception biscornue, et tendancieusement déviante de la Démocratie par l’élite politique et qui est naturellement entrain de contaminer une frange importante de la Société et selon laquelle Démocratie rime avec anarchie, impunité des hommes politiques surtout, défiance et insolence en direction de l’Autorité et des institutions, libertinage, mépris des lois et règlements.
Aujourd’hui le ver est dans le fruit car beaucoup d’acteurs de la scène politique, se sont faits malheureusement un nom, une célébrité conjoncturelle, à partir de propos malveillants ou irrévérencieux à l’endroit des institutions.
Ainsi ce sabordage des hommes politiques Sénégalais de leur statut et de leurs appareils, la désacralisation des institutions et de l’Autorité, qui constituent le mythe de la République, ont emmené certains citoyens à se faire l’illusion que la gestion de la Cité n’est plus l’affaire des politiques. Ce faisant la République dont l’organisation et le Fonctionnement démocratique ne sont que la duplication de l’appareil politique, court de gros risques de basculement dans la tyrannie individualiste. En attestent déjà ces avant-goûts de programmes de candidats indépendants qui ressemblent beaucoup plus à compilation de désidératas personnels qu’au fruit d’une réflexion collective bien mûrie.
Le dernier péril mais le plus imminent est celui qui vient de notre presse, surtout parlée, radios, Télévisions où le professionnalisme semble avoir déserté certains journalites et animateurs au profit d’ un militantisme aujourd’hui non voilé. L’investigation, la vérification des faits, l’analyse des sources ont laissé la place aux commentaires des faits, à la rumeur, aux extrapolations de chroniqueurs soit disant spécialistes de tout et de rien.
La compétition pour la primeur de l’information ou de plateaux évènementiels les plus croustillants, prennent le pas sur la Formation, l’Education et l’information juste des citoyens, sur l’accompagnement du Processus démocratique. Dans cette veine, l’on verse souvent dans la caricature, le maquillage des faits, la désinformation, l’on sort des héros, des Présidentiables des cuisses de Jupiter.
L’on tend son micro à n’importe qui, l’on invite n’importe qui, l’on fait le buzz à des individus qui dans l’ordre normal des choses ne devraient pas d’humer l’air de la liberté. Ainsi passant sous silence ce que les hommes valent réellement, ce qu’ils ont fait, ce qu’ils peuvent faire pour leur pays, on s’aliène l’intérêt du pays, on verse dans l’émotion, dans le clientélisme électoraliste et on forge à son homme une opinions en substitution à une évaluation correcte et objective de sa légitimité.
Ainsi la Presse a fini de nous fabriquer des Présidentiables à partir d’ hommes sortis du néant, sans fait d’armes au sein de leur Formation politique en dehors d’intrigues de palais, sans carrière d’homme d’Etat ou administrative ou parfois sans vécu politique retraçable. Non le véritable danger pour la République et la Démocratie est là avec le risque voir un jour le pays tomber entre des mains inexpertes ou de joueurs de Loto et ceci par la magie noire et désastreuse de l’opinion.
Ressaisissons nous pendant qu’il est encore temps, restons vigilants et patriotes jusqu’au dernier souffle !
Walmaak ndiaye
Observateur politique, spécialiste de questions sociales
