SYNDICALISME : ENTRE ABNEGATION ET ALTRUISME (Me El Hadji Ayé Boun Malick DIOP)

SYNDICALISME : ENTRE ABNEGATION ET ALTRUISME (Me El Hadji Ayé Boun Malick DIOP)

Le syndicalisme authentique repose sur deux piliers essentiels : l’abnégation et l’altruisme. Ces deux notions traduisent l’essence même de l’engagement syndical, qui n’est ni un tremplin personnel ni un espace de confort, mais bien un lieu d’effort, de don de soi et de responsabilité collective.

L’abnégation : le renoncement de soi au service du collectif

Le syndicalisme implique un sacrifice constant : celui de son temps, de son énergie, parfois même de sa carrière ou de sa tranquillité personnelle. Le syndicaliste, en s’engageant, accepte de s’exposer aux pressions, aux marginalisations, voire aux représailles, pour défendre les droits des autres. C’est ce renoncement volontaire à certains privilèges ou ambitions personnelles qui fonde l’abnégation.

Être syndicaliste, c’est souvent mettre de côté sa progression hiérarchique pour ne pas compromettre son intégrité.

C’est accepter les réunions tardives, les batailles juridiques, les négociations sans fin, sans autre gratification que la satisfaction morale d’avoir défendu une cause juste.

L’abnégation est donc un renversement des logiques individualistes : elle suppose un désintéressement profond dans un monde où chacun est sommé de « réussir pour soi ».

L’altruisme : l’autre comme finalité de l’engagement

Le deuxième mot-clé, l’altruisme, renvoie à la centralité de l’autre dans l’action syndicale. Un syndicaliste digne de ce nom ne milite pas d’abord pour lui-même, mais pour les travailleurs, les précaires, les sans-voix. L’amélioration des conditions de travail, la justice salariale, le respect des droits sociaux : ce sont les besoins d’autrui qui motivent l’engagement.

L’altruisme syndical consiste à prendre en charge des revendications qui ne concernent pas nécessairement sa situation personnelle.

Il implique une empathie active, une capacité à se mettre à la place de l’ouvrier exploité, du fonctionnaire harcelé, du salarié licencié abusivement.

L’altruisme fonde ainsi la légitimité morale de l’action syndicale. Sans lui, le syndicalisme bascule dans le corporatisme, voire dans l’opportunisme politique.

Conclusion : une éthique militante à préserver

Dans un contexte de crise de la représentation, de soupçons de compromission et d’instrumentalisation politique, il est essentiel de rappeler que le syndicalisme véritable ne peut survivre sans abnégation ni altruisme. Ces deux vertus ne sont pas des slogans ; elles sont des exigences. C’est à cette éthique militante que l’on reconnaît les grands syndicats et les grands syndicalistes.

Dakar, le 4 août 2025

Me El Hadji Ayé Boun Malick DIOP,

Secrétaire général national du Syndicat

des Travailleurs de la Justice (SYTJUST)

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