En cette troisième journée du procès de l’affaire dite “Boffa Boyotte’” six personnes ont été entendues. Trois accusés (Abdou Karim Sagna, Adama Diémé et Ibou Sané) et trois témoins. Ils ont été auditionnés par le président de la chambre, Sidy Dieng, en présence de leurs avocats.
C’est à 1O heures que les audiences ont démarré et c’est la nommée Oumy Sané, témoin, qui a été entendue. Epouse de l’accusé Alfousseyni Badji, cette dame devait témoigner des propos tenus par son époux lors de son audition de la veille. L’accusé avait soutenu qu’il a été informé du carnage par sa femme Oumy Sané. Devant la barre, l’épouse s’est démarquée de cette version de son époux et a soutenu face au président de la chambre qu’elle n’a jamais informé son mari. Poursuivant, elle a déclaré:”je ne me suis mêlé de rien. Je n’ai jamais rien su de cette affaire.”
Place à l’accusé Abdou Karim Sagna. Présenté comme l’organisateur de la tuerie survenue le 06 janvier 2018 dans le forêt classée de Bayotte, Abdou Karim Sagna dont le fils Abdou Sagna -25 ans au moment de son arrestation- vient de recouvrer la liberté après quatre années de détention a fait face à ses juges. Devant la barre, il a nie les faits qui lui sont reprochés. A la barre, il a soutenu qu’il a été interrogé par le juge au moment de l’instruction sans la présence de son avocat. Des propos démentis sur le coup par le procureur de la République. Le procès-verbal d’enquête préliminaire avait révélé que le téléphone de l’accusé Abdou Karim Sagna avait été localisé le 05 janvier en Guinée à la veille du carnage. Interrogé sur son voyage en Guinée Bissa, il déclaré ne pas être dans les dispositions de confirmer cette supposée présence.
Après avoir fini d’écouter Abdou Karim Sagna, les juges ont appelé Adama Diémé à la barre. Menuiser de son état, l’accusé Adama Diémé n’a pas varié dans ses propos. Pour rappel, cet homme a commencé à développer des troubles mentaux avec son arrestation et son placement en détention. A l’enquête préliminaire comme devant cette chambre criminelle, l’homme a tout nié. Et ni les gendarmes comme les 3 juges d’instruction qui se sont penchés sur son dossier n’ont jamais produit à son encontre. Alors que l’accusation voudrait qu’il soit en brousse en train de tuer de pauvres qu’il connaissait d’ailleurs, Adama Diémé a soutenu qu’il était à Bourofaye au moment des faits et qu’il n’est ni de près ni de loin mêlé à la tuerie “orchestrée’’.
Ibou Sané Nafoute, l’autre grand accusé a été entendu au cours de cette troisième journée de procès. Poursuivi pour association de malfaiteurs et participation à ce massacre du 6 janvier 2018, il a nié les accusations et a précisé qu’il n’a été informé de la commission du massacre que après les faits, vers 18 heures par le biais de la radio Zig FM. Pourtant, comme l’a révélé Kéwoulo, il a été l’auteur de cette deuxième liste de délation dont se sont servis les gendarmes pour procéder à des arrestations. Interpellé sur ce point, Ibou Sané Nafoute a reconnu la paternité de sa liste et a déclaré l’avoir fait à la demande des gendarmes et à la suite de tortures qui lui ont été infligées. Interrogé sur la relation qu’il entretiendrait avec un certain René Capain Bassène, longtemps présenté comme “le cerveau de la tuerie”, Ibou Sané Nafaoute a déclaré qu’il n’avait jamais connu René Capain Bassène auparavant. Selon les Procès Verbaux, Ibou Sané aurait eu des échanges téléphoniques avec René Capain Bassène en prélude du carnage.
Frustré par cette accusation qu’il trouve “mensongère”, Ibou Sané a dit à ses juges et au public que c’est en prison qu’il a connu René Capain Bassène. “Je ne l’ai connu que après notre arrestation et, précisément, en prison” Faisant parti des détenus remis en liberté le 28 janvier dernier, Nfaly Diémé -qui a bénéficié d’un non-lieu- a été à nouveau entendu. Son speech s’est fondé sur une remarquable cohérence. Il a attesté qu’il a toujours participé à la protection des ressources forestiers. Mais, il n’a jamais été informé de la préparation de ces tueries. Digne, et en regardant droit ses juges dans les yeux, il a déclaré que ces quatre ans passés en prison ne font partie que de son destin. “J’accepte mon sort, c’est la volonté divine.”
Abdoulaye Diawara maçon de son état est un témoin oculaire des faits. Rescapé de la tuerie, lors de son interrogatoire il avait dit avoir reconnu des visages des auteurs qui n’étaient pas encagoulés. Et, l’homme appelé à soutenir l’accusation du parquet a déclaré que “ces personnes (qu’il peut) formellement identifier ne sont pas parmi les inculpés présents à la salle d’audience de tribunal. Et, finalement, à 18 heures 11 minutes, le président du tribunal a décidé la suspension des audiences. Au public qui en demandait, il a donné rendez-vous pour ce jeudi 24 mars. Ce sera le quatrièmes jour de procès.
