Le drame a encore frappé dans les rangs des innocents arrêtés et incarcérés dans le cadre de l’affaire dite de Boffa Bayotte. Après l’ancien chef du village de Toubacouta, Seyni Sané, (82 ans) décédé en détention pour l’assassinat, le 6 janvier 2018, de 14 bucherons, c’est au tour de Jean-Baptiste Badji de quitter ce monde sans que la justice sénégalaise ne lui rende sa dignité. Il est décédé ce vendredi dans son village de Bourofaye Diola.
Incarcéré à la suite de l’enquête ouverte par les hommes du commandant Issa Diack, ancien patron de la Section de Recherches de la gendarmerie nationale, Jean-Baptiste Badji fait partie du lot de ceux que la gendarmerie avaient présenté comme les tueurs des 14 bucherons de la forêt des Bayotte. Interpellé le 13 janvier, cet homme, le frère cadet du chef Maurice Badji, est le principal naïf que des politiciens ont utilisé pour accuser d’innocentes personnes de la tuerie qui, ce 6 janvier 2018, avait ému le Sénégal et plongé le village de Toubacouta dans la grande catastrophe judiciaire mais aussi social qu’il a connu. Bucheron lui-même, Jean-Baptiste Badji est un ancien militaire devenu, avec la précarité qui sévit dans le coin, l’un des gars les plus assidus de cette foret des Bayotte.
Aussi, cet homme décrit comme un marginal est aussi considéré comme l’un des plus proches du journaliste René Capain Bassène, un journaliste d’investigation, chargé de communication de l’ANRAC. Ce jour-là, revenant de Mpack, village frontalier entre le Sénégal et la Guinée Bissau, c’est Jean-Baptiste Badji qui est l’un des tous premiers habitants du secteur qui, après avoir entendu des détonations de fusils automatiques, est tombé sur la macabre scène de corps récupérés dans la forêt, par le chef Edouard Dassylva de Boffa Bayotte, et remis aux gendarmes sur la RN4. A la vue de cette scène insupportable, il a aussitôt appelé l’un des hommes en qui il a le plus confiance: René Capain Bassène pour l’informer de ce qu’il venait d’apercevoir sur la route.
Emprisonné suite à son implication dans cette affaire par son grand frère, Maurice Badji, Jean-Baptiste Badji a été l’un des alliés et des gendarmes et de l’accusation. Soutenant son frère dans ses accusations farfelues, il est celui qui a déclaré devant le tribunal qu’il aurait entendu René Capain Bassène dire «que le sang va couler.» Incarcéré le 13 janvier 2018, Jean-Baptiste Badji avait bénéficié d’un non-lieu le 29 janvier 2022 après quatre années de détention préventive. Ce jour-là, Moussa Diédhiou, Fodé Mady Tall, Mamadou Lamine Sagna dit Dou, Abdoulaye Diédhiou, Moussa Diémé, Mamadou Lamine Diémé, Landing Sané, El Hadj Samba Sagna, Maurice Badji, Aliou Sané, Mamadou Lamine Fakéba Diémé et lui ont passé la nuit d’hier chez eux, entourés de leur famille. C’est plusieurs mois plus tard, que 12 autres personnes seront acquittées laissant derrière les barreaux les détenus Oumar Ampoï Bodian et René Capain Bassène.
Revenus chez eux, ces anciens détenus n’ont, plus, jamais recouvré la pleinitude de leur santé ni de leur dignité. Si Jean-Christophe Diatta, l’étranger de Toubacouta, celui-là qui a écrit le dernière liste de 3 personnes, a quitté le village laissant femme et enfant derrière lui, Jean-Baptiste qui s’était converti à l’islam a vécu tranquillement dans son coin jusqu’à ce qu’’un malaise ne vienne ce vendredi le ravir à l’affection de son épouse. Il a été enterré ce samedi vers les coups de 14 heures à Bourofaye, son village natal.
