On en sait un peu plus sur le meurtre de Sangari Diédhiou à Coubanao, dans le département de Bignona, à une quinzaine de kilomètre de Ziguinchor, la capitale du sud du Sénégal. Dans ce village jadis paisible, et niché au cœur de ce qu’on appelle les Kalounayes, s’est produit un crime indicible que les villageois, jadis pudiques, s’efforcent tant bien que mal à expliquer aux journalistes et aux enquêteurs venus faire irruption dans leur quotidien.
Vingt-quatre heures après le drame qui a vu un père succomber aux coups mortels de son fils aimé, Kewoulo s’est rendu dans ce village de Koubalang où, si devant les caméras on préfère dire que “le meurtrier est un gosse sans histoires qui aimait son père d’un amour irrationnel”, dès que les appareils sont éteints, les confidences des villageois dressent un tableau sombre de celui que tous appellent désormais “Le boucher de Coubanao.”
Présenté à l’opinion comme “un gosse sans histoires” dont rien ne laissait, dans le comportement, présager cet abominable drame, “Papo Diédhiou est, à en croire des témoignages recueillis hors caméra, un adepte du chanvre indien. Un fou ramené au village dans l’espoir de le guérir et l’intégrer” Cet homme, donc, peu bavard et ami de tous dans le village comme dans le patelin qui a, en ce lundi 27 janvier, poignardé à mort son propre père, Sangari Diédhiou, et planté des coups de lame dans la chair d’un de ses neveux, venu au secours du vieil homme agonisant, est un fils perdu par le chanvre indien. A en croire des témoins oculaires de la scène, c’est après la prière de timis (19 heures) que le drame s’est déroulé, ce lundi 27 janvier, au village de Coubanao.
“Il n’y avait aucun différend entre eux, son père était assis tranquillement et Papo est venu le trouver et lui a planté des coups de couteau dans la région du cœur.” A déclaré M. Sané, un des neveux de la victime. A en croire Moussa Tamba, même si tout le monde le connait dans son village, Papo Diédhiou est presque un étranger à Coubanao. “C’est un gosse qui a grandi à Dakar. Et c’est récemment qu’il est revenu dans ce village. Moi, je l’ai vu le vendredi dernier et j’ai remarqué qu’il avait un peu grossi. Et il m’a dit qu’il avait mal aux pieds. Et, c’est plus tard que j’ai compris que c’est un drogué dit. Mais ca, ce sont ceux qui connaissent les signes des drogués qui me l’ont dit.” Si Moussa Tamba connait peu de choses de Papo et des signes permettant d’identifier un fumeur du joint, M. Sané, par contre, en sait plus sur son neveux camé. Et, pour Kewoulo, il a accepté d’en dire un peu.
“C’est moi qui lui ai payé le billet pour qu’il vienne de Dakar s’installer à Coubanao, il y a deux mois. Parce que, à Dakar, il s’enfermait tout le temps dans sa chambre refusant presque le contact avec les autres. Je pensais qu’en venant au village, on allait lui faire suivre des soins traditionnels. Et quand j’appelais, on me disait qu’il avait du mieux. Mais, j’étais loin d’imaginer que ce genre de drame allait survenir.” A déclaré Sané. Aussi, de tous les témoignages recueillis sur place, il se raconte que Papo Diédhiou était très agité ces derniers temps. “C’est parce qu’il était en manque de drogue et cela se faisait sentir. Mais, personne dans sa famille n’était là pour lui venir en aide sur ce plan”, ont déclaré des témoins sous anonymat. “Avant le drame, moi je l’avais surpris en train de brûler son matelas. Quand je me suis approchée de lui, il m’a ordonné de partir de là et je me suis exécutée” A témoigné une tante.
Aveuglé par son amour pour ce fils dément et toujours enfermé dans son monde, le vieil homme, lui, n’avait rien vu venir. Surpris par la lame assassine que son fils lui a planté, il a été retrouvé mort, sur place, baignant dans une mare de sang. Après avoir commis le drame, Papo Diédhiou a quitté le village avant l’arrivée des gendarmes appelés en intervention. “On a essayé de l’interpeller pour le remettre aux gendarmes. Mais, avec son couteau, il a tenu tout le monde à distance.” A déclaré Moussa Tamba. De leurs cotés, les pandores, revenus bredouille de leur mission d’interpellation, ont rédigé une fiche de recherches pour donner le signalement du fuyard. Entre temps, c’est auprès de ses oncles maternels que Papo s’est rendu à Babaat.
Dans ce village d’où est originaire sa mère, il est venu leur demander de l’accompagner, à revenir à Coubanao, demander pardon aux siens pour l’agression de son père. C’est là que ses oncles, qui avaient été avertis du drame, lui ont fait savoir que son père était décédé des suite de son agression. Abattu par la nouvelle, Papo Diédhiou s’est laissé interpeller par les siens qui l’ont aussitôt conduit vers les gendarmes. Il était minuit passé, en ce mardi 28 janvier 2020, lorsque les militaires ont notifié au présumé meurtrier le début de sa garde à vue. Le commencement d’une mort lente et pénible pendant laquelle cette justice des hommes -si expéditive même à l’encontre des fous-, ne tiendra, certainement, pas compte de l’état d’altération de son discernement au moment de la commission des faits.
