Dans un contexte de renforcement démocratique au Sénégal, l’adoption de la Loi organique n° 2025-11 du 18 août 2025 marque un jalon décisif pour l’Assemblée nationale. Ce texte, qui réforme en profondeur le règlement intérieur de l’institution, vise à adapter les procédures parlementaires aux défis contemporains. Porté par le Président de l’Assemblée, El Malick Ndiaye, ce projet traduit une ambition claire : moderniser les rouages internes, accroître le contrôle sur l’exécutif et promouvoir une transparence accrue. Mais au-delà de ces objectifs louables, cette réforme soulève aussi des débats sur l’équilibre des pouvoirs. Retour sur un consensus républicain qui pourrait redéfinir le rôle du Parlement sénégalais.
L’histoire de cette réforme remonte au 27 juin 2025, date à laquelle les députés de la 15e législature ont adopté, à une quasi-unanimité, la proposition de loi organique n°10/2025 modifiant le règlement intérieur. Sur 139 votants, 138 ont approuvé le texte, avec une seule abstention, illustrant un rare consensus transcendant les clivages partisans. Des formations comme le PASTEF, au pouvoir, aux oppositions historiques, tous ont salué l’initiative comme un pas vers l’efficacité institutionnelle.
El Malick Ndiaye, élu à la tête de l’Assemblée en mars 2025, a été le fer de lance de cette modernisation. Dans un entretien accordé à la RTS le 23 août 2025, il a défendu une vision d’un Parlement « moderne, responsable et tourné vers l’avenir », insistant sur la digitalisation des procédures et le respect du débat démocratique. La promulgation officielle au Journal officiel, le 30 août 2025, a scellé ce processus, confirmant l’entrée en vigueur de la Loi n° 2025-11.
Ce large soutien bipartisan reflète une maturité politique au Sénégal, post-élections de 2024. Comme l’a souligné la presse, cette adhésion collective renforce le rôle du Parlement dans la consolidation de la démocratie, loin des tensions partisanes qui ont parfois marqué les sessions passées.
Au cœur de cette loi organique se trouve une refonte des procédures internes pour les rendre plus fluides et adaptées à l’ère numérique. Parmi les innovations phares :
- Digitalisation des travaux : Introduction de systèmes de vote électronique et de plateformes pour les commissions, visant à accélérer les délibérations et réduire les coûts logistiques.
- Renforcement du contrôle gouvernemental : Les commissions d’enquête parlementaires gagnent en prérogatives, avec une périodicité accrue pour les questions d’actualité au gouvernement (tous les trois mois). Cela permet un suivi plus rigoureux de l’action exécutive, aligné sur les attentes citoyennes en matière de reddition de comptes.
- Transparence accrue : Obligation de publication en ligne des rapports de commissions et des agendas des séances, favorisant l’accès public aux débats. Des mesures anti-corruption, comme la déclaration d’intérêts des députés, sont également renforcées.
Ces changements visent explicitement à « moderniser le fonctionnement de l’institution et améliorer la transparence ». Selon les analystes, ils répondent à une demande sociétale croissante pour un Parlement plus efficient, dans un pays où la jeunesse, majoritaire, exige une gouvernance inclusive.
| Axe de Réforme | Mesures Clés | Impact Attendu |
|---|---|---|
| Modernisation des Procédures | Vote électronique, digitalisation des commissions | Accélération des délibérations, réduction des coûts |
| Contrôle de l’Exécutif | Questions d’actualité trimestrielles, enquêtes élargies | Meilleur suivi des politiques publiques |
| Transparence | Publication en ligne des documents, déclarations d’intérêts | Accès citoyen accru, lutte contre la corruption |
Malgré l’enthousiasme initial, la réforme n’a pas échappé à des réserves. Le 24 juillet 2025, le Conseil constitutionnel a rendu une décision partielle de censure (N°2/C/2025), invalidant quatre articles jugés contraires à la Constitution. Parmi les points retoqués :
- L’article 56, qui autorisait la convocation de magistrats par les commissions parlementaires, perçu comme une atteinte à l’indépendance judiciaire. Le juge Mamadou Yakham Keïta avait alerté sur ce risque d’« intimidation » du pouvoir judiciaire.
- Des dispositions rigides sur les motions de censure (article 111), limitant le retrait d’une motion une fois la discussion engagée, jugées excessivement contraignantes pour la flexibilité démocratique.
Ces censures rappellent un enjeu fondamental : concilier transparence et séparation des pouvoirs. Comme le note La Nouvelle Tribune, « la volonté de rendre des comptes est légitime, mais lorsqu’elle déborde sur des domaines protégés, elle devient problématique ». L’Assemblée a dû ajuster son texte pour se conformer à ces réserves, avant la promulgation finale.
Promulguée le 18 août 2025, cette loi organique s’inscrit dans une dynamique plus large de réforme institutionnelle au Sénégal. Elle complète les avancées de la 15e législature, comme la Loi de Finances Rectificative 2025, adoptée dans la foulée, qui prévoit un apurement de 500,9 milliards FCFA de dettes de l’État. Pour El Malick Ndiaye, c’est l’occasion de « consolider le rôle du Parlement dans la démocratie sénégalaise ».
Pourtant, l’application effective de ces mesures sera scrutée. Les observateurs appellent à une mise en œuvre rigoureuse, pour éviter que la modernisation ne reste qu’un vœu pieux. En renforçant les outils de contrôle et de transparence, ce nouveau règlement pourrait bien transformer l’Assemblée en un contrepoids plus robuste face à l’exécutif, favorisant une gouvernance plus accountable.
Au final, la Loi n° 2025-11 n’est pas seulement un texte technique : elle incarne une volonté politique de faire évoluer le Sénégal vers une démocratie plus mature. Reste à ce que les actes suivent les mots, pour que ce tournant majeur profite à tous les citoyens.











































